Je sais que c'est ridicule, le magasin est juste au-dessous de chez moi. Mais quand arrive l'automne, j'ai besoin d'accumuler. Des salaisons, du vin, du bois. La peur que l'hiver apporte la misère habite au fond de moi. J'ai passé de trop nombreux moments à me battre : la guerre, le camp de prisonniers, la faim noire, les amis emportés par le gel. Si je fais des provisions, je suis mieux à même d'affronter la saison du repos, de la lecture, du recueillement. Il y a des années, la neige m'a tenu isolé pendant des journées entières. Je suis resté sans lumière et sans téléphone. C'était magnifique. J'étais heureux, tranquille, je n'avais même pas la télé. Les flocons tombaient sans bruit. J'avais du bois, de la farine blanche, du lard, du fromage et une histoire à écrire.
Paolo Rumiz, La légende des montagnes qui naviguent (Du Piave à l’Adige), page 108.
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