3 mars 2013

A la recherche du temps perdu (25)

Soulevant un coin du voile lourd de l'habitude (l'habitude abêtissante qui pendant tout le cours de notre vie nous cache à peu pres tout l'univers et dans une nuit profonde, sous leur étiquette inchangée, subsitue aux poisons les plus dangereux ou les plus enivrants de la vie quelquechose d'anondin qui ne procure pas de délices), ils me revenaient comme au premier jour, avec cette fraîche et perçante nouveauté d'une saison renaissante, d'un changement dans la routine de nos heures qui, dans le domaine des plaisirs aussi, si nous montons en voiture par un premier beau jour de printemps, ou sortons de chez nous au lever du soleil, nous font remarquer nos actions insignifiantes avec une exaltation lucide qui fait prévaloir cette intense minute sur le total des jours antérieurs.
Proust, Albertine disparue, page 125.

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